« qu’on soit béni, ou qu’on soit maudit, on ira, (…) avec les saints et les assassins (…) les femmes du monde et les putains, (…) ne crois pas ce que les gens disent, c’est ton cœur qui est la seule église! » Mercredi soir, le Palais omnisports de Bercy, comble, debout, enflammé, reprend en final, les paroles de Michel Polnareff. Le chanteur, d’une voix toujours jeune et mélodique, goûte son triomphe. Il a raison, le spectacle, la voix, les mots restent immuables. Pourquoi ce moment me revient en lisant le début de cet article du Monde daté du samedi 14 mai : « Au hammam, un corps n’a pas de secrets. Je suis toute nue avec mes cicatrices. Mes cicatrices sont un livre ouvert, un livre de coups, un manuel d’histoire de moi-même. » Cette phrase ouvre le récit de la comédienne marocaine Loubna Abidar. Les cicatrices dont parlent Loubna Abidar sont celles des agressions dont elle est l’objet à Casablanca pour avoir osé jouer le rôle d’une prostituée dans le film de Nabil Ayouch, Much Loved, présenté l’an dernier à Cannes. Une société machiste où l’intégrisme gagne tous les jours. Une société qui dénie aux femmes la liberté de leurs choix. Les hommes peuvent aller au « bordel’, mais personne n’en parle. Les hommes ont tous les droits. Les femmes doivent se taire et subir. Les paroles de Loubna font froid dans le dos. L’hypocrisie est la règle. Tout est dans les apparences. On tue et on viole, mais chut, cela doit rester secret!
L’histoire de Loubna Abdir, à paraître le 18 mai dans un livre « La Dangereuse » chez Stock, rappelle les avertissements de l’écrivain algérien Kamel Daoud sur les frustrations et les dangers des sociétés musulmanes gagnées par l’intégrisme religieux.Avec la Charia, dans le monde, 500 millions de femmes subissent la violence des hommes. Et ici même en Europe, un mouvement de régression se développe sous nos yeux. Des voix s’élèvent, parmi elles, l’une forte et juste, celle d’Elisabeth Badinter, dénonce la privation de liberté des femmes emprisonnées sous le voile, et le danger que cela représente pour nos sociétés. Mais d’autres ne veulent pas les entendre. Pourquoi? De quelle cécité sont-ils frappés? Quelle idéologie les en empêche? « Je ne tends plus la main aux hommes pour leur dire bonjour. Ils refusent de la prendre. » me dit une amie qui soigne dans un dispensaire de la banlieue parisienne. « Ils ont la carte de la sécurité sociale. Ils sont de la deuxième ou troisième génération, parfois des convertis. » Des lendemains qui ne chanteront pas pour les femmes.
on ira tous au paradis, même’moi, on ira ( …) les femmes du monde et puis les putains.
Cela me rappelle, l’attitude des européens, et tout particulièrement des médias français au début des années 2 000, saluant l’arrivée au pouvoir en Turquie des islamo-conservateurs emmenés par Erdogan. Les plus sérieux de nos quotidiens, de nos journalistes, se félicitaient de la réconciliation promise de l’Islam et de la démocratie. Un avenir radieux pour la Turquie et pour son entrée dans l’Europe nous était prédit – rappel de l’aveuglement des mêmes devant Staline, Mao, Pol Pot, le salut à l’entrée des khmers rouges dans la capitale cambodgienne !- On voit ce qu’il en est aujourd’hui. Une dictature religieuse, une suppression des libertés, les opposants mis en prison, le nouveau Sultan Erdogan, ivre de puissance, met son peuple au pas, aidé par le populisme religieux le plus inculte. Et veut en faire autant de l’Europe. L’Europe qui se croit faible hésite. L’Europe, gangrené par l’esprit de Bruxelles, ne sait pas qu’elle est bien plus forte que le président turc. Que l’Europe menace Erdogan d’embargo économique, et ose le faire !
avec les saints et les assassins…
Un commissaire français à l’Union Européenne, Pierre Moscovici, représente bien cette démission européenne. En niant les racines judéo-chrétiennes de l’Europe, il retire son identité culturelle à la mosaïque des peuples européens et à leur histoire. Il veut faire un homo économicus propre à tout digérer, tout consommer. Cette Europe est en train d’échouer. Le commissaire de Bruxelles nie la réalité comme ceux qui se sont aveuglés à Munich, à Phnom Penh, à Istanbul..
Loubna Abidar : (…)De retour à Marrakech, je fais ma valise. Je dis au revoir à Bernardo et à Luna, qui doit rester là pour l’école. Je file vers l’aéroport, j’achète un billet et je prends le premier avion pour la France. » Depuis, Bernardo et Luna, son mari et sa fille, ont pu la rejoindre. Ils vivent désormais tous les trois à Paris.
On ira tous au paradis, mêm’moi…c’est ton cœur qui est la seule église.