« Tout s’accélère« est le titre d’un documentaire qui sort mercredi en salles. Son auteur-réalisateur, Gilles Vernet, est un mathématicien-financier qui, alors qu’il vit confortablement à New-York, décide un jour de changer de vie. Il revient en France, s’occupe de sa mère condamnée par un cancer, devient instituteur dans une classe de CM2 de Belleville, dans l’est de Paris. Il écrit un scénario pour la télévision, veut donner du sens à sa vie. Tout s’accélère part d’une question posée aux enfants de sa classe. Comme des poupées gigognes, Gilles Vernet avance avec les enfants, les questions engendrent des réponses, et d’autres questions. Un sociologue, un philosophe, un grand patron, intercalent leurs points de vue, des séquences images et musiques emplissent l’espace.
Les enfants découvrent le temps. Plus encore, ils participent à nous en faire découvrir les enjeux. Nous savons tout cela, l’emprise des technologies dans le quotidien, la rupture des années 90. Revoir tout cela est impressionnant. Une ville se construit en 7 ans à Dubaï. Les tours tutoient le ciel, brillantes la nuit, réfléchissant violemment le soleil le jour. Posées sur le sable, ancrées sûrement dans la roche ou l’acier. Tours de Babel que l’on peut retrouver un peu partout. J’ai la chance- le privilège- de traverser tous les jours les plus beaux endroits de Paris, pour passer de la rive droite de la Seine ou j’habite à la rive gauche ou j’ai des bureaux.
Place des Victoires, Cour carrée du Louvre, Passerelle des arts, place Saint-Germain. Parfois le jardin du Luxembourg et aussi le forum des Halles en débouchant de la Bourse du commerce. C’est ici que je peux contempler les vanités ratées et la grâce réussie.La canopée inaugurée il y a peu, doublement du budget, lourdeur jaune métallique – 7 000 tonnes d’acier parait-il- de ce qui devait être aérien, bah! un spectaculaire ratage qui rend encore plus étonnant à ma gauche, l’église Saint-Eustache, monument de force et de beauté. Des siècles nous contemplent, tranquilles, pendant que la vanité d’à côté, déjà vieille, sait déjà qu’elle ne tiendra pas le siècle.
Mais ce n’est pas la question, me dit un ami architecte. Tout se consomme de plus en plus vite. On construit, on détruit pour reconstruire, on ne cesse de changer. Tout s’accélère. Rien ne vaut la peine d’être conservé. Je sais qu’avec cette moderne pensée, mon trajet quotidien n’existerait pas. Ce serait autre chose, de l’éphémère…